Dum Dum Girls – I Will Be

C’était une chouette fille, elle avait fait des études de lettres, puis elle l’avait épousé. Au début c’était bien, le mariage avait été un grand moment de bonheur, ils restaient ensemble, tout le temps, puis ça c’est dégradé. Lui rentrait de plus en plus tard le soir, il disait que le travail devenait trop prenant, puis il passait aussi beaucoup de temps à jouer sur des jeux vidéo ou a traficoter des DVD. Quand il n’était pas là, elle s’ennuyait profondément dans cet appartement trop grand pour elle. Un jour il était revenu avec un drôle de disque, « un truc prêté par un pote qui s’y connait en musique, mais j’accroche pas trop, je lui ai pris pour lui faire plaisir et qu’il arrête de m’en parler ». Elle s’était mise à écouter le CD, à chaque fois qu’il n’était pas là, à chaque fois que ça l’énervait. Les Dum Dum Girls, ça sonnait bizarrement mais cette musique était si bonne, des guitares saturées et claquantes, un son un peu sale, un chant d’une grande innocence, des compositions d’une belle simplicité, à la manière de certains vieux tubes que sa mère lui faisait écouter quand elle était petite.

Un soir, elle eut le déclic sur Yours Alone, cette chanson faisait plaisir à entendre alors qu’il n’était toujours pas là ; un pot au bureau avait-il dit. Elle décida de s’y rendre, et c’est alors qu’elle le retrouva en train de glisser des billets de cinq euros dans le soutien gorge trempé de punch coco de la nouvelle stagiaire aux ressources humaines. It Only Takes One Night. Trop d’absence, trop d’écart, ça sonnait encore et encore, très fort dans l’appartement. Elle attrapa sa canne de golf et commença à tout casser, le home-cinema, la décoration, les étagères, l’ordinateur, la console de jeu-vidéo, la hi-fi, la boîte de poker, tout ce fatras consumériste … Elle ouvrit sa valise et y mit quelques vêtments, puis elle attrapa un revolver planqué sous son bureau. Elle trouva aussi les clefs de la voiture, elle sortie de l’appartement après y avoir foutu le feu. Blank Girl

Elle tira quelques coups de feu dans les couloirs, avant de crier devant les voisins qui sortaient sur le palier, en pyjama, tout en s’inquiétant. Elle descenda par l’escalier avant de partir en voiture. Arrêtée à un feu rouge, elle déclina quelques peintures indiennes sur ses joues avec son rouge à lèvre, pendant que les guitares garages et sixties de  Bhang Bhang, I’m A Burnout continuaient de hurler dans l’auto-radio. Elle espérait qu’elles ne s’arrêteraient pas de hurler ces guitares, encore et encore, comme un symbole de liberté, comme pour mieux profiter ce moment avec soi-même, comme pour mieux oublier tout ce temps perdu avec lui. Elle partait pour la campagne, loin, pour d’autres petites villes, comme dans un film indépendant tourné en noir et blanc. Dans la voiture, elle entendait maintenant résonner la rythmique binaire et le chant gavé de reverb’ de Dee Dee sur Rest Of Your Lives

( ♫ ) Dum Dum Girls – Rest Of Your Lives

Par Mathieu

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7 thoughts on “Dum Dum Girls – I Will Be

  1. Tiens c’est vraiment marrant parce que ce n’est pas du tout le thème narratif que j’aurais choisi si j’avais décidé d’en parler ainsi. J’associe justement les Dum Dum Girls à un groupe de filles non féministes qui symbolise plutôt la famille et le couple que le contraire. Peut-être est ce du à la stabilité du milieu familiale de Dee Dee ou au rôle qu’a son mari au sein du groupe… Je ne sais pas. Au fond, je les ressens même pas comme riot 🙂

  2. Pas faux, mais c’est moins le contenu même du texte finalement que l’atmosphère qu’il installe. Et je dois dire que je trouve l’association parfaite. Ça fonctionne exactement comme quand on s’imprègne d’un disque d’abord par les sons, le rapport entre eux, les couleurs que son écoute répétée fait émerger. Les paroles ne viennent qu’après, si même elles viennent un jour.

    (par ailleurs, tu as choisi le même morceau que moi comme extrait de l’album, et du coup, je ne peux que te conseiller très très vivement Best Coast, que je trouve encore meilleures dans la genre. Plus Lo-Fi certes, mais plus fraîches aussi…) Elles n’ont fait que des 45 tours à ma connaissance, mais ont peut facilement “écouter” ceux qui sont déjà épuisés… et acheter les autres !

  3. Bon, je réponds pas à tout pour éviter de trop me justifier sur le texte, ceci dit, je suis content que ça vous fasse réagir 🙂 !

  4. j’adore ! Ya un côté Thelma et Louise hyper urbain. Je confirme, t’as raison, j’ai beaucoup aimé

    Pour autant j’aime toujours pas The Dum Dum Girls

    1. Ahah, d’ailleurs je prépare la suite de ce texte avec Best Coast (normal le groupe sonne pareil que les Dum Dum Girls :-)).

  5. …la bassiste est trop mignonne….par contre, sur scène, c’est pas encore complétement en place…

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