L’écoute de « Folklore » fait toujours ressortir des sentiments contradictoires, entre le plaisir de retrouver cette musique fascinante et l’évocation d’une période pas très joyeuse. L’avant-dernier album de Sixteen Horsepower fait partie de ces boites à souvenirs que j’aime bien rouvrir de temps en temps, même s’il m’évoque quelques moments où j’aurais aimé être loin, mais très loin de mon travail plutôt que de subir quelques affres de la lutte quotidienne. Je me rappelle avoir écouté longuement ce disque après avoir raté le passage du groupe de David Eugene Edwards à la Cigale, je crois que ça devait être le 9 septembre 2002.
Ce matin-là, j’étais au travail, et j’avais prévu de rejoindre des amis le soir-même pour le concert en question. Sauf qu’une fois la journée démarrée, quelqu’un est venu me dire que je devais rester ce soir en dehors des heures ouvrées, jusqu’à minuit pour finir de nombreuses tâches en cours qui doivent être impérativement finies. A l’époque je faisais encore le petit soldat, et je suis resté. Je n’avais pas su trouvé les mots pour éviter ce coup de pression bien inutile. C’est ainsi que j’ai loupé ce concert de Sixteen Horsepower, merveilleux selon les dires de mes amis qui y étaient. Une belle occasion manquée …
Depuis je n’arrête pas d’écouter ce disque, comme pour rattraper ce temps perdu, comme pour me rappeler que les bons moments valent toujours mieux que quelques tâches exécutées à 23h30 dans des locaux à St-Quentin-En-Yvelines …
La pochette annonce plutôt bien la couleur de cette musique, rude, sombre, dark. Pourtant, à l’exception de quatre titres, Sixteen Horsepower reprend des vieux classiques de country, comme le chant traditionnel Sinnermann, qui est l’un de ces rares titres qu’il est toujours bon d’écouter le soir, allongé sur son canapé, les yeux rivés sur le plafond. Je me souviens que j’avais été plutôt fatigué par le rythme de travail à ce moment là, à me forcer à faire des choses que je n’avais pas envie de faire mais dont je me sentais obliger de faire. Heureusement la voix de David Eugene Edwards était là pour me redonner le goût d’une certaine liberté. Sur Sinnermann, elle donne envie de partir loin, l’envie de grands espaces et de solitude. Cette voix d’une grande présence, d’une rare émotion, elle donne l’impression de le voir là, habité par je ne sais quels fantômes issus d’un ouest qui me parait très lointain.
« Folklore », cet album porte bien son nom, car David Eugene Edwards y joue du folk, et du bon, raide comme un vieux whisky. Avec son banjo, il égrenne quelques mélodies en mode mineur sur des picking d’une rare tristesse, tandis que la contrebasse part dans les profondeur caverneuses de quelque chose qui ressemble à une ambiance dépressive. Pourtant, tout n’est pas triste dans ce disque, Single Girl et La Robe A Parasol apporte une étrange tonalité, beaucoup plus positive, le genre de titre qui fait aimer la country, le genre de disque qui donne envie d’écouter Johnny Cash, en particulier en duo avec June Carter. Le genre de disque qui donne envie de changer des choses, qui donne envie de dire non …
( ♫ ) Sixteen Horsepower – Sinnerman
Par Mathieu
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