J’ai toujours eu un peu de mal à accrocher sur la musique des super-groupes, car je crois que le tout n’est pas forcément égal à la somme des parties. Prenez les meilleurs musiciens, faites les jouer ensemble, sans synergie, ce qui en sort ne m’intéresse pas vraiment, et en lisant la présentation de Beak>, il semblerait que cette conviction soit aussi partagée par le groupe. Alors qu’en voyant le line-up je commençais à me méfier de ce trio composé de Geoff Barrows (Portishead), Matt Williams (claviériste de Team Bricks) et Bill Fuller (bassiste de Fuzz Against Junk), mes doutes se levèrent après une première écoute rapide. Je trouvais le résultat étonnant, la suite se révèla passionnante.
Je ne sais pas si Geoff Barrows l’a dit quelque part en interview, mais ce disque semble être une preuve d’affection pour les Silver Apples, groupe New-Yorkais des années 70 qui savait manier un certain psychédélisme avec une batterie métronomique et des claviers vaporeux. On pouvait déjà entendre cette influence sur le dernier album de Portishead, notamment avec Machine Gun, ce qui n’était pas toujours pour plaire aux fans de la première heure du trio de Bristol. Avec Beak>, Geoff Barrows peut donc donner libre cours à ces accents krautrock, et il suffit d’entendre l’excellente première piste, Blackwell, pour se rendre compte que les rythmes répétitifs, la basse caverneuse et le clavier audio-oscillant sont les maitres à bord.
Le résultat peut parfois rebuter, notamment par sa froideur, et c’est un petit peu le cas sur certains titres qui peinent à décoller, comme Ham Green et sa basse fuzz qui débarque un peu trop tardivement pour nous arracher les tympans dans un souffle abrasif. Pour autant l’album contient de très bons morceaux, notamment grâce aux contraintes imposées lors de l’enregistrement, l’album ayant été enregistré pendant douze jours, joué live (le mix de la batterie est assez bluffant). Il y a de très bons moments avec les excellents I Know et Iron Acton qui avancent sur un rythme particulièrement effréné. Sur Pill, Beak> mélange les arrangements de Can avec les atmosphères de films de John Carpenter ; ce titre, écouté au casque dans la rue, m’a donné l’impression d’entendre un inédit de la B.O d’Assault. Enfin les guitares gorgées de delay sur Battery Point viennent poser une pause ambiante salutaire. L’ensemble des titres est traversé par un chant réverbéré, mixé très en retrait, qui véhicule une relative étrangeté et dont les paroles incompréhensibles sont plus utilisées comme un instrument mélodique que pour faire passer un véritable message.
Beak> réalise là un très bon premier disque, avec des hauts et des bas, résolument imparfait et donc humain, mais il n’en demeure pas moins passionnant à écouter. Ce premier essai plutôt bizarre contient quelques moments sublime qui appelent une suite qui l’on imagine fascinante, car ce Beak> là n’est pas rasoir …
Par Mathieu
Et aussi :
Ce Beak> là il n’est pas rasoir… c’est pour remplacer le Kraut de Beak> que tu n’as pas osé mettre? 🙂
Oui c’est exactement ça ! 🙂
Ah ah, je l’avais pas sentir venir cette conclusion 😉
En revanche j’aurais généralisé, le “et c’est un petit peu le cas sur certains titres qui peinent à décoller”
En tout cas, ils ont de l’allant, Beak.
héhé excellent, j’étais sûr que tu allais en trouver un …
Gonzaï ayant eu la primeure du Kraut de Beak>, je me suis rabattu sur un autre jeu de mot …
Est-il vrai qu’il y a parfois des accents à la Morrissey sur ce disque ?
Non je demandais ça parce que j’avais vu qu’il y avait du Moz’ en Beak…
Qui s’y frotte s’y Beak !
“Dis donc, tu ne manques pas d’air, oh Beak !…”
Est-ce la présence de Geoff Barrow qui donne son style au Beak ?
Et je ne parle pas des plantes dont profita le groupe par le passé pour alimenter son inspiration. En d’autres termes je ne mentionne pas les racines qu’eut Beak.
(j’aimerais un peu de respect pour celle-ci).
Y a un petit côté math-rock, c’est la racine qu’eu beak (très en forme Tristan … :))