Les chansons simples sont de celles dont on ne remarque pas les détails mais qui coulent de source. Les chansons simples te donnent l’impression de découvrir comme au premier jour des mélodies que tu connais déjà. Les chansons simples sont composées avec quelques accords de guitare. Les chansons simples sont celles que tu n’as pas osé composer. Les chansons simples sont celles qui réconcilient tout le monde. Les chansons simples impressionnent autant que ce nouveau groupe un peu drone, un peu ambiant, un peu expérimentale que tu viens de découvrir par hasard, mais elles ont un côté vieille classe qui les rend absolument indispensables. Les chansons simples sont étrangement calmes. Les chansons simples te donnent envie de jouer du piano. Les chansons simples te font du bien de bon matin, et cela jusqu’à la fin de l’année, et peut être même plus. Les chansons simples prennent du temps à être peaufinées avant d’être écoutées par nos oreilles incrédules, et c’est sûrement pour cela que Jim O’Rourke a mis des années à réaliser « Simple Songs » …
( ♫) Jim O’Rourke – Friends With Benefits
Les chansons simples sont de celles où chaque instrument semblent trouver sa place. Les chansons simples peuvent être écrites par n’importe qui, même celui qui s’aventure pendant de longues années dans le harsh noise. Les chansons simples prennent immédiatement de l’ampleur, et cela en partant juste d’un arpège de guitare acoustique. Les chansons simples ont des violons et des trompettes et ça ne te casse jamais les oreilles. Les chansons simples sont parfois la spécialité de certains génies comme Van Dyke Parks ou Randy Newman. Il n’y a souvent pas plus de huit ou neuf chansons simples sur un album, mais elles te donnent immédiatement envie de réécouter le disque. Les chansons simples n’ont pas besoin de lock-groove ou de boucle sonore. Les chansons simples sont celles où l’on n’a pas besoin de trop s’étendre pour savoir si elles sont biens. Les chansons simples ont beaucoup d’amour …
( ♫) Jim O’Rourke – All Your Love
Mathieu
Ton billet fait du bien, car j’ai pu lire de belles âneries sur ce disque, entre ceux qui prenaient pour argent comptant le titre (“un disque sans prétention” ah, ah !) et les autres qui taxaient O’Rourke de rétro, papy soft rock à barbe (pas une once de concession à la modernité, guitar-héros mégalo, arena rock, ah, ah, ah !). C’est bizarre que les gens ne prennent plus la peine d’écouter les disques, et préfèrent y plaquer leurs préjugés stylistiques… voire vestimentaires ! A une autre époque, O’Rourke s’était fait un peu critiquer pour des accointances un peu trop rock, avec Tweedy et Kotche, pour “Insignificance” et les deux albums de Loose Fur. Moi j’avoue que cette versatilité me fait plaisir, d’autant plus qu’elle a sa cohérence, qui dépasse de très loin le pastiche ou le jeu des 7 citations. “Simple songs” me donne envie de recompulser toute sa disco et de fureter à nouveau du côté de quelques doux génies inoxydables : Randy Newman, Judee Sill, pour y entendre cette même douceur confessionnelle, avec ses piques d’ironie, sa sophistication sans étalage, un art toujours un peu oblique de se raconter…
Il me semble que pour Jim O’Rourke, il n’y a pas de différence entre ses projets expérimentaux et des disques comme Simple Songs. A relire pour l’occasion cette passionnante interview du monsieur http://www.the-drone.com/magazine/je-ne-me-sens-absent-pour-personne-jim-o-rourke-nous-parle-de-son-premier-disque-de-chansons-depuis-2001/