Juste avant de se donner la mort le jour de Noël, Vic Chesnutt a enregistré deux chefs d’œuvre, le flamboyant « At The Cut », réalisé avec Guy Picciotto et les musiciens de Godspeed You Black Emperor, et « Skitter On Take-Off », produit par Jonathan Richman. Ce dernier possède un dépouillement qui égale l’élégie de « At The Cut », un admirable contrepoint qui restera malheureusement comme le dernier album de Vic Chesnutt.
Joué à fleur de peau, totalement dénudé dans sa composition, Vic Chesnutt a réalisé ce disque quasiment seul avec sa fidèle guitare acoustique. Sur quelques titres il est accompagné par le batteur de Jonathan Richman, Tommy Larkins, tandis que l’ancien Modern Lover pose de temps à autre une guitare discrète. La production est légère, minimaliste et relâchée, elle permet à Vic Chesnutt de nous tirer quelques larmes avec des histoires tristes comme la mort, des histoires hantées par une forme de délabrement. L’émotion est là, palpable et ne nous relâchera qu’à la fin de l’album, avec Sewing Machine.
Sans chichis, “Skitter On Take-Off” risque d’être l’un de ceux où pour l’auditeur l’émotion est sans cesse parasitée par le malaise de se sentir voyeur. Ce que l’on y entend semble joué d’avance, malgré quelques accès de violence et de fureur rentrée, comme ce My New Life et son texte qui prend aux tripes, « I Don’t Have to Listen Your Bullshit Anymore, I Don’t Have To Be With No Asshole Anymore, In My New Life », chanté avec une évidente douleur.
A l’instar du « Pink Moon » de Nick Drake, ou encore de certains disques de Syd Barrett, Vic Chesnutt réalise là un dernier grand album, sensible, vulnérable, triste. De ces grands disques qui vous emportent par son émotion tangible. Un chef d’œuvre qui sonne terriblement comme une forme de testament …
Par Mathieu
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