Les derniers fils de la réalité sont en train de se déchirer devant moi. Je m’approche doucement de ce vide intersidéral qui s’ouvre depuis la bibliothèque. Je garde une main sur le mur et je tend l’autre vers le cosmos qui semble s’étendre au delà des ténèbres. Des formes étranges évoluent dans un espace non-euclidien alors qu’un bruit furieux commence à envahir mon cerveau pour ne laisser place qu’à un immense bourdonnement distordues sur lequel on perçoit vaguement un long hurlement qui semble provenir de cette incantation issue d’un ancien manuscrit resté enfoui dans les archives que l’on peut trouver à droite de la colline, en sortant du vieux port. J’imagine mille prophéties maléfiques alors que je me retourne pour partir en courant, les oreilles en sang sous l’abominable assaut d’une guitare électrique en provenance du fond des âges.
Je me retrouve au croisement de la route, en pleine campagne, au petit matin. J’ai l’impression d’avoir erré pendant un siècle au fin fond d’un cimetière cauchemardesque. Je reprends peu à peu mes esprits en montant dans un vieux bus qui traverse les champs de maïs. J’espère joindre la ville d’ici la soirée et j’en profite pour faire une sieste. Une vieille entité tentaculaire se met à me parler dans mon sommeil et m’explique que sa couleur préférée est le jaune. Stupeur à mon réveil quand je découvre que les cheveux de mon voisin sont devenus blonds et l’humeur matinale submerge l’horizon de reflets jaunes. Arrivé à la ville, je frappe des gens, je leur hurle dans les oreilles, j’essaie de reproduire le son des distorsions qui se répandent dans mon cerveau. Demain je serai interné dans l’asile pour aliénés, à côté du phare au bord de la mer. Je pourrais enfin attendre tranquillement la fin des temps maintenant que le message des Grands Anciens va se propager dans le monde entier. L’heure sera venue pour moi de rejoindre la cité engloutie au fond des océans.
( ♫) The Great Old Ones – Shadow Over Innsmouth
Mathieu