Je pianote nerveusement sur le clavier en imaginant un futur sonore, un univers peuplé d’étranges fantômes qui se perdent au milieu des machines. J’écoute les nappes de synthétiseurs et j’imagine cette profusion d’instruments électroniques comme une carte mentale représentant un monde musical et labyrinthique dans lequel il est facile de se perdre. Caché dans cette usine désaffectée, plongé dans l’obscurité, j’écris des lignes d’algorithme pendant que tout le monde dansent autour de moi alors que l’artiste que je suis venu voir se concentre sur ses platines. Dehors il pleut, j’imagine que le jour va bientôt se lever, je devrais traverser cette banlieue dans un vieux bus pour rejoindre mon microscopique studio que je n’ai pas vu depuis trois jours.
Le cyberpunk n’a jamais vraiment été en phase avec le reste du monde mais les flux d’information que l’on échange ont de quoi déstabiliser n’importe-qui. J’entends les rythmiques répétitives, les boites à rythme étrangement programmées, les blips et les beats réverbérés que l’on écoute pour imaginer demain et découvrir qui nous sommes aujourd’hui. J’ai quitté la rave, je ne suis pas fait pour danser et je rentre sous la pluie. Le casque sur les oreilles, j’avance dans cette ville à l’architecture grise, les immeubles ressemblent à un blockhaus et bientôt je me reconnecterais chez moi. Je déchiffre cette musique rendue virtuelle à force d’en être resté là. Je décode le nom de l’artiste, Bjarki et son album, « Happy Earthday », ressemble à l’écho lointain d’un voyage mécanique.
( ♫) Bjarki – AN6912
Mathieu