Deliluh – Beneath The Floors

Je me souviens encore du seul et unique concert de Slint que j’ai eu la chance de voir. Ils ont joué l’intégralité de « Spiderland » le 24 mai 2007 au Bataclan, et je bloque encore sur les riffs sombres et saisissants joués par David Pajo ce soir là. Que dire de la voix terrifiante de Brian McMahan à part qu’elle me hante à chaque fois que j’écoute la fin de Good Morning, Captain ? Britt Walford ? S’il reste dans l’ombre en jouant de la batterie, il n’en demeure pas moins l’artiste qui contrôle tout ce qui se joue. Quand il vient s’assoir sur le devant de la scène pour jouer l’immense Don, Aman, tout le monde se tait et écoute. Aujourd’hui, je me demande encore comment ce groupe a pu ensuite exploser en vol en 1991 et surtout, pourquoi écoute-t-on aussi peu de descendants des Slint ?

Vendredi 15 Novembre, je retourne au Petit Bain pour un concert de soutien à Mains d’Oeuvres. Il est 21h, la salle est malheureusement clairsemée. Deliluh démarre son set avec un long bourdonnement qui s’étire grâce aux modulations de deux synthétiseurs, aux souffles d’un saxophone et aux percussions viscérales de la batterie. Très vite les musiciens abandonnent leurs machines pour accélérer les morceaux avec des guitares ciselées comme du fil de fer barbelé et une basse qui vous écrase violemment les tympans. Ils jouent du punk avec une certaine anxiété comme s’ils voulaient convoquer les fantômes de The Fall et, justement, Slint. La beauté de la répétition génère parfois des effets stellaires et on ne saurait trop saluer les groupes qui, comme Deliluh, essayent de retrouver – non sans quelques imperfections mais ce n’est pas trop grave – la force des compositions du quatuor de Louisville.

De retour chez moi, je découvre que Deliluh vient tout juste de sortir un second disque. « Beneath The Floors » a été enregistré dans différents lieux communautaires à Toronto. J’y entends des expérimentations sonores, des fulgurances et des orchestrations organiques où la noirceur ressemble à une mine de plomb. Les lentes progressions de Hymn ou Hangman’s Keep portent en elles la tristesse de plusieurs générations d’indie-kids et les guitares distordues de Incantessa et Cleat Walker vous attrapent par la gorge pour ne plus jamais la relâcher. Car c’est toute la force de la musique de Deliluh, être aussi raide et viscérale que celles de ses aînés et avancer furtivement vers un avenir encore flou. Et ça, c’est le genre d’attention qui se respecte.

( ♫) Deliluh – Incantessa

Mathieu

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