La soirée commence, on traine sous le porche de la maison et une pluie légère vient adoucir les fortes chaleurs. L’Amérique est en clair obscur et Will Oldham fait de même avec sa guitare acoustique. S’il prêche en écrivant quelques blues sombres sur la mort, c’est pour mieux chanter les plaisirs de la chair, comme une envie furieuse de vivre et même plus encore. Les chansons que Bonnie « Prince » Billy déclame d’une voix frêle nous accompagnent depuis tellement d’années qu’il suffit d’entendre leurs accords gratouillés pour revenir aux sources même de son art : raconter des histoires simples, soigner son anxiété et habiller les mythes anciens dans leur plus simple appareil.

Will Oldham était devenu plus rare ces derniers temps, c’est dire mon impatience d’écouter son nouveau disque, « Keeping Secrets Will Destroy You ». Douze titres où le folk caillouteux de Bonnie « Prince » Billy scande quelques sagesses sur un air débonnaire (Like It Or Not), chante la joie, les couleurs et l’amour accompagné de trois arpèges (Crazy Blue Bells) avant de dépeindre une étrange vision de l’enfer sur le bourdonnement ambiant d’une mandoline et d’un violon (Trees Of Hell). Bonnie « Prince » Billy partage tout un monde, avec ces amis, sa famille, et nous aussi qui l’écoutons calmement dans notre salon.

Avec Rise and Rule (She Was Born in Honolulu) Bonnie « Prince » Billy conte l’histoire de toute une vie en pinçant simplement les cordes d’une guitare en bois. Sa voix prend un timing étrange, elle part à l’aventure avant de revenir sur un chemins de côté connu uniquement du compositeur. C’est une chanson pour se retrouver et l’écouter tous ensemble avant de tous disparaître. Will Oldham parle des autres tout en parlant de lui, même caché, derrière sa barbe ou sa moustache, il demeure au cœur de chacune de ses ballades.

( ♫) Bonnie “Prince” Billy – Rise and Rule (She Was Born in Honolulu)

Mathieu