L’ennemi est là, devant vous, il faut lui rentrer dedans sans somation et rire de lui, même dans la défaite, si possible en jouant le plus de riffs distordus jusqu’à la fin des temps. Tel pourrait être l’inéluctable mantra psalmodié par l’infatigable John Dwyer dont la production ne cesse de nous surprendre : 29 albums pour au moins un ou deux par an avec Osees, Thee Oh Sees, Oh Sees et une exploration sans vergogne de tous les spectres musicaux allant du rock garage sous caféine à la musique progressive jouées sur des synthétiseurs analogiques en passant par un post-punk aussi véhément que cette bonne vieille fripouille de Mark E. Smith. Aujourd’hui, les Etats-Unis et le monde qui va avec sont un peu plus au bord du chaos et le bruit de « ABOMINATION REVEALED AT LAST » semble être l’une des seules réponses positives à tout ça.
Après les synthétiseurs de « SORCS 80 », John Dwyer revient au punk garage qui nous ont fait découvrir le bonhomme il y a une quinzaine d’années. Guitares saturées comme jamais par une Fuzz aussi granuleuse qu’un terrain vague, ligne de basse balancée comme une mitrailleuse, une ou deux batteries dont on n’arrive pas à suivre les BPM : Les musiciens de Osees sont lancés à toute berzingue sur l’autoroute du hardcore hurlé envers et contre tout par un John Dwyer visiblement en forme. Avec des titres comme God’s Gut, Coffin Was ou Ashes1 le groupe convie autant les spectres des Sonics, de Dead Kennedys et de Can pour embarquer tout ça vers un ailleurs dont seul leur frontman a le secret. Même quand il ralenti légèrement le tempo pour laisser la place à quelques lignes de synthétiseur sur Sneaker ou Glass Window John Dwyer demeure en sur-régime, seule sa musique permettra d’évacuer avec rage, humour et fracas les relents fasciste qui nous entourent.
Sur Protection, Osees canalise sa colère envers et contre tout pour la recracher sur les milliardaire de la tech, les gouvernements aux relents fascistes, les bombardements génocidaires et l’Intelligence Artificielle. Le titre démarre sur des hurlements punk cagneux, une suite de power chords jouée sur une guitare désaccordée, une batterie en roue libre avant de laisser la place à un synthétiseur et une basse distordue répétant jusqu’à l’hypnose la même ligne progressive. Le titre se termine dans le mur, un ultime geste qui demeure l’un des sons les plus cathartiques de notre époque.
Mathieu