Sous un étrange abri, très loin de l’univers urbain dans lequel tu passes le plus clair de ton temps, tu peux voir un couple en train de sculpter des coquillages. De loin tu entends déjà les incantations qui proviennent du temple et il t’est difficile de discerner clairement les étranges mélopées qui sont en train de se former. Alors tu regardes les coquillages peints, et tu discernes un ensemble de glyphes polychromes en hommage à Tlaloc, le dieu de la pluie, accompagnés de quelques formes vaguement anthropomorphes. Tu te rapproches alors du temple, au fur et à mesure de tes pas qui s’enfoncent dans la terre boueuse les suppliques sont de plus en plus fortes.
Dans la salle, à l’abri de la pluie, tu peux voir des musiciens jouer avec des marimbas, des flûtes, d’étranges instruments à cordes, ils répètent de mystérieux motifs chromatiques qui semblent projeter les auditeurs dans un état de transe, ils ont l’air d’avoir été transférés dans les tréfonds de l’Inframonde. Des délires vaguement cosmiques sortent de la bouche de quelques personnes, et tu peux distinguer quelques substances hallucinogènes, sûrement du mescal, qui avaient été déposées là sur un plat en forme de tétrapode. Alors tu décides d’en prendre, et au bout de quelques temps, sous l’effet de la drogue, de la musique et de la chaleur humide, tu vois apparaître des motifs géométriques ainsi que des bandes célestes qui se dessinent dans l’immensité de la salle …
Devant toi, il y en a qui récitent le Popol Vuh aux sons répétitifs et planant des instruments, les effets des substances prises quelques instants plus tôt s’accentuent et tu sens tes tempes en train de gonfler, comme si ton cortex voulait sortir de ton corps. Il y en a qui invoque le Dieu A, le Dieu de la Mort, mais toi tu vois des formes de plus en plus floues, l’Inframonde s’ouvre à toi dans un immense mouvement cosmique, tandis que la musique n’est plus qu’un gigantesque drone hallucinogène qui tourne en boucle, tu ne sens plus ton propre corps, tu remarques alors que ton doigt est ensanglanté après avoir toucher ta tête, que tu es écorché vif, tes muscles sont détachés de ton corps et se meuvent devant toi dans un geste grotesque et maladroit. A cet instant précis tu te sens pousser un hurlement et un rire de dément …
Plus tard, tu te réveilles loin du temple, allongé dans la boue. Ton t-shirt est sale, il semblerait que tu t’es vomi dessus. Tu regardes ton sac, l’appareil photo est cassé. Ta bouche est pâteuse et une douleur immense te traverse le crâne. En te levant, tu essayes de ramasser maladroitement le reste de tes affaires et déjà tu te remémores vaguement quelques images. Dans un effort intense tu te rappelles avoir vu une femme nue se faire attaquer par un immense serpent sorti d’un puits …
( ♫ ) Expo 70 – Descending Celestial Moon Odyssey
Par Mathieu