Le hasard veut que j’écoute le dernier album de Wire alors qu’Andy Gill, le guitariste de Gang Of Four, vient tout juste de nous quitter. Wire, Gang Of Four, deux groupes qui ont traversés les quatre dernières décennies à coup de fulgurances sonores, de guitares anguleuses, de basses versatiles et de textes modernes, jamais avares en commentaires sur notre époque. Si l’avenir de Gang Of Four semble aujourd’hui compromis, celui de Wire continue de s’écrire autour de Colin Newman, Graham Lewis, Robert Gotobed et Matthew Simms, qui remplace Bruce Gilbert depuis « Send ». Je me souviens y avoir découvert Wire avec l’immense In The Art Of Stopping – avant de revenir sur la sainte trinité « Pink Flag », « Chairs Missing » et « 154 » – dont la puissance dévastatrice aurait pu devenir une sorte d’impasse si l’histoire ne s’était pas écrite sous un angle plus pop avec « Object 47 », « Red Barked Tree », « Silver / Lead » et, aujourd’hui, « Mind Hive ».
Les musiciens de Wire sont en âge de se reposer sur leurs habitudes, Colin Newman compose et Graham Lewis écrit. On retrouve cette orchestration compacte des instruments, ces arrangements organiques où la distorsion des guitares suit les nappes de synthétiseur et les basses fréquences. La texture s’impose tranquillement comme un bloc sonore dont l’assemblage a probablement nécessité quelques temps devant ProTools. Wire commente notre époque, c’est le spectacle triste et affligeant de notre monde, mais aussi notre rapport aux écrans, le Brexit, Marcel Duchamp et quelques fulgurances d’écriture que l’on croirait sorties d’un livre de JG Ballard.
A quoi doit on la réussite de « Mind Hive » ? Est-ce dû aux compositions immédiates de Be Like Them ou Cactused ? A moins que ce ne soit la longueur de Hung où les orchestrations se font plus complexes ? Ou tout simplement avec Primed And Ready que l’on écoute sans penser au lendemain, en faisant fi de toute nostalgie. Une volonté farouche que l’on doit à ces vieux groupes de Post-Punk, que ce soient les regrettés Gang Of Four ou les survivants de Wire.
Mathieu