Bambara – Stray

Sing Me To The Street commence par un synthétiseur fantomatique et une percussion lointaine mais c’est avec la ligne de basse que le morceau prend son envol. On marche la nuit dans une ruelle sombre. Nous sommes perdus dans les années 90. Les intonations de Reid Bateh évoquent autant un Jeffrey Lee Pierce apaisé que le Nick Cave alors narrateur d’histoire de fantômes gothiques sur Red Right Hand. On marche dans les rues de Birmingham au siècle dernier. On roule sur les routes sombres d’une Amérique hantée par les enquêtes surnaturelles du FBI. On se perd dans des pavillons de banlieue terrorisés par un slasher au masque pathétique. Il faut bien comprendre que le groupe Bambara, formé par les frères Reid et Blaze Bateh, c’est avant-tout l’artisanat d’une série B horrifique, un long-travelling, une photo bleu-orange, un thriller monstrueux où l’on découvre, effrayé, une armée de croque-mitaines.

Sing Me To The Street c’est tout ça et bien plus encore. Il y a cette basse qui se lance dans un étrange numéro d’équilibriste. Elle est à la fois omniprésente et totalement distante. La guitare se contente d’accompagner. Elle reste à côté du morceau avant de jeter une phrase lointaine pour invoquer le fantôme de Rowland S. Howard pour quelques riffs alambiqués. Reid Bateh se traine. Il prend le temps de nous raconter ses histoires mortifères avant de disparaître progressivement, comme si nous n’avions jamais existé. Et les choeurs de Drew Citron et Ani Ivry-Block sont là pour contrebalancer cette envie d’être abattu comme un vieux cheval.

Sing Me To The Street c’est le genre de morceau sombre que j’ai envie d’écouter en boucle lorsque la nuit tombe, en étant légèrement aviné. La production cagneuse contraste avec sa noirceur gothique mais c’est le lot des musiciens qui s’aventurent dans le Southern Gothic. Sing Me To The Street s’arrête subitement, sur un dernier coup de batterie et j’imagine déjà Bambara jouer en concert. Nul doute que la soirée soit d’une rare intensité.

( ♫) Bambara – Sing Me To The Street

Mathieu

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