Etant né en 1977, je fais maintenant partie de cette génération un peu fatiguée pour qui la nuit blanche devient problématique. Cela fait bien longtemps que je ne suis pas rentré chez moi à l’aube, traversant la ville dans une ambiance gazeuse et claire-obscure. Le seul instant où j’ai l’impression de revivre un peu ça, c’est quand je cours le dimanche matin dans des rues désertes, avec de la musique dans les oreilles. Dans ces moment-là, le dernier disque de The Bug, « In Blue », enregistré sur une période de confinement / déconfinement en collaboration avec Dis Fig, fonctionne sans aucune mesure pour émerger au petit matin avec une rythmique électronique répétitive et des voix éthérées.
Le dub froid orchestré par Kevin Richard Martin, alias The Bug, me semble être, encore une fois, la sonorité qui se révèle parfaitement adaptée pour rester enfermé chez soi. Le chant de Felicia Chen, alias Dis Fig, se mélange avec les basses sombres de cette musique perdue dans le brouillard. Je sais que ça fait partie de la marque de fabrique de The Bug, mais il y a dans les filtres de ces synthétiseurs quelques choses qui rend cette musique terriblement hypnotisante. J’y ressors à la fois engourdi, enveloppé par ces fréquences profondes, mais rassuré par les paroles réverbérées de Dis Fig. Des sonorités dans lesquelles je reste à me lover, en imaginant mon salon comme un potentiel territoire.
Sur Levitating les synthétiseurs modulent et les infra-basses résonnent dans nos oreilles avec une infinie régularité. La voix immaculée de Dis Fig surnage au milieu des boites à rythme dont les filtres compressés, tels des sauterelles martiales perdues dans un terrain vague, grésillent doucement dans oreilles et viennent presque réveiller un vieil acouphène fatigué. Trois minutes et vingt-quatre secondes qui se perdent dans les échos léthargiques du matin.
( ♫) The Bug & Dis Fig – Levitating
Mathieu