Le générique, une pop élégante écrite dans les années 60, tourne et j’enlève le casque de mes oreilles avant de ranger mon ordinateur pour aller me coucher. La musique est mélancolique mais c’est parce que nous devons quitter le film. J’étais assis sur mon canapé si vous voulez savoir. La transition entre une histoire plus grande que la vie et l’image de mon salon me rappelle combien les films sont un étrange succédané d’évasion en ces temps où l’on reste chez soi. Dans ces moments-là, le très classieux « Providence » de Chevalrex – une première moitié en apesanteur, la seconde peut être moins inspirée, mais il faudra confirmer avec le vinyle pour être sûr – nous transporte aussi sur ces rives lointaines.
Alors c’est quoi Chevalrex ? Ou plutôt c’est qui ? On pourrait parler des mélodies composées avec un sens de orfèvrerie entendu au gré des quatre disques de Rémi Poncet. On pourrait aussi évoquer la splendeur lo-fi des Frères Nubuck, écrite avec son frère Gontard ! Certes, mais on se contentera de l’évidence avec les chansons de « Providence » qui s’ouvre sur les synthétiseurs délicats de Au Crépuscule – une figure de style qui donne immédiatement envie de compiler tous les titres évoquant la tombée de la nuit – avant de se refermer par quelques accords de guitare et une note d’espoir torride sur Désirade. Entre les deux, une embellie pour notre dimanche après-midi, à l’image de cette pochette, une photo prise il y a un an lors du mariage de Rémi Poncet, une éternelle lune de miel loin de la gravité du moment.
Et si je devais emporter un morceau de Chevalrex sur une île déserte ? Probablement La Tombe de Jim. On y entend un piano langoureux, une batterie qui progresse de façon nonchalance, un bottleneck dont les notes glissent comme mille voyages, et une basse omniprésente, mélodique, qui claque sur chaque note probablement jouée au médiator. Le chant doucereux de Rémi Poncet prend son temps derrière le micro, il nous raconte une histoire, à la fois cinéma d’aventure comme on les aime et mystères qui nous laissent dans l’interrogation. Et je crois que le petit solo de guitare – joué par Mocke ? – qui surgit dans les dernières secondes du morceau constitue le plus beaux points d’orgue de « Providence ». Celui qui fait défiler avec quiétude les images de notre salon.
( ♫) Chevalrex – La Tombe de Jim
Mathieu