L’histoire est connue d’avance, Lou Barlow enregistre des disques à la maison, inlassablement et, paradoxalement, comme pour fuir les affres du quotidien. Sa musique est souvent une aventure au milieu de toutes ses angoisses narrées sur une guitare acoustique, où chaque accord fait office de rythmique sèche, où chaque petite phrase fait pleurer les plus cyniques d’entre nous. Le voilà de retour avec « Reason to Live », avec en ouverture In My Arms qui sample un vieux morceau enregistré en 1982 avant d’effectuer un bond dans le temps jusqu’à aujourd’hui, où l’évidence mélodique saute aux oreilles à l’écoute de ces nouvelles compositions. Lou Barlow ne pleurniche plus sur son sort et accepte la vie comme elle vient, au Massachusetts avec sa femme et ses 3 enfants, entre deux tournées de Dinosaur Jr. On pourrait poliment parler d’album de la maturité, sauf que l’écriture est ici à la fois parfaitement maitrisée et pleinement libérée. On préférera simplement parler de chef d’oeuvre.
On sent bien que Lou Barlow est plutôt inspiré en ce moment, Garden, l’un de ses deux morceaux que l’on peut entendre sur le dernier Dinosaur Jr, mettra tout le monde d’accord, et le songwriting de « Reason to Live » s’impose dès les premières notes de guitare acoustique. Reason to Live, Why Can’t It Wait, I Don’t Like Change, en 17 titres et quarante-cinq minutes Lou Barlow s’émancipe d’un modeste cahier d’esquisses pour tracer les contours d’une grand disque folk, probablement son plus inspiré depuis longtemps. Les accords de guitare en bois progressent comme les pulsations d’un cœur gros comme ça. Lou Barlow retrouve la joie de composer avec les petits détails, basse moelleuse, riff sur la guitare électrique, petit solo sympathique, nappe de synthétiseur, boite à rythme coolos.
Difficile de choisir un titre parmi tant d’autre au milieu de ce disque qui ne manque pas de moments forts. Avec le temps on imagine qu’un best-of des meilleurs titres de Lou Barlow serait le meilleur hommage qu’on pourrait lui rendre. Mais je crois que ça n’en vaudra pas forcément la peine. Aujourd’hui on retrouve certains de ces plus beaux morceaux sur « Reason to Live ».
Mathieu