Sunn O))) – Life Metal

Je crois que l’écoute répétée de Sunn O))) il y a presque une dizaine d’année m’a sauvé la vie en m’évitant une dépression, ou du moins une sorte d’affreux burn-out. On a les drames un peu stupides de son époque. Je devais écrire des lignes de codes jusqu’à l’épuisement et, tout en constatant l’inutilité de la chose, j’avais droit quasi-quotidiennement aux coups de pression, insultes et coups bas d’un petit chef comme on en fait malheureusement encore. Ajoutez à ça, mon trajet quotidien se résumait en partie à prendre la ligne 3 pour me rendre à Levallois, et le seul moyen que j’avais trouvé pour reprendre un peu mon souffle au milieu de cette tempête d’emmerdes à répétition fut de littéralement plonger dans les moindres ossatures de « Monoliths and Dimensions ». Il m’a probablement fallu du temps pour m’en rendre compte mais, dans ces moments là, la musique de Stephen O’Malley et Greg Anderson a été une sorte de rituel de purification dont les effets bénéfiques se font encore ressentir aujourd’hui.

Une fois sorti de cette galère, il fallait que je les vois sur scène. Quiconque a vu Sunn O))) en concert en garde forcément une image à jamais gravée dans son crâne. Je me souviens de la Gaîté Lyrique en 2012, cachés sous leurs robes de bure, les deux musiciens brandissaient au ralenti leurs guitares pour faire résonner leurs cinquantaines d’amplis tandis qu’un troisième larron modulait quelques ondes supplémentaires sur un synthétiseur vénéneux au milieu de toute cette électricité prégnante. Je suis resté hypnotisé plus d’une fois sur ces longs riffs de guitares distordues qui s’étirent pour former de longs bourdonnements qui vont jusqu’à prendre le rythme de votre souffle. Une musique qui appelle à une sorte de méditation en jouant sur le volume pour remplir tout l’espace de fréquences australes.

Depuis ce concert, j’ai l’impression que chaque disque de Sunn O))) repose sur une collaboration qui viendrait teinter d’étranges couleurs les compositions de Stephen O’Malley et Greg Anderson. Il y a eu les vocalises sombres d’Attila Csihar sur « Kannon », les orchestrations froides d’Ulver avec « Terrestrials », l’expérimentation baroque avec Scott Walker pour « Soused ». Aujourd’hui, j’écoute leur nouveau disque, « Life Metal », enregistré par Steve Albini avec pas mal de nouveaux invités comme la violoncelliste Hildur Guðnadóttir dont les cordes radioactives me plongent littéralement dans un état second sur la seconde moitié de Novæ. Il me semble qu’il y a toujours autant de textures distordues, même si je les sens plus éclairées qu’avant. Mais c’est probablement ma perception des choses qui a changée grâce à ces fréquences intemporelles.

( ♫) Sunn O))) – Troubled Air

Mathieu

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.