David Heumann pose sa guitare à côté de l’ampli et la session d’enregistrement se termine. On ne sait plus si c’est le milieu de la nuit ou de l’après-midi. Le reste du groupe est épuisé. Arbouretum vient de mettre sur bande les 11 minutes et 48 secondes de Let It All In. Le morceau de bravoure donnera son titre à leur prochain album, et, dans un univers parallèle ce rock rustique rendrait fou de joie n’importe quel fan de musique psychédélique. Mais dans le monde où nous vivons, Arbouretum intéresse quelques aficionados à défaut d’obtenir un succès franchement mérité. Le groupe existe depuis 2002 et David Heumann compose inlassablement des titres cagneux, ciselés de fuzz et d’accords folks, évoquant systématiquement les grands espaces et une certaine idée du cool.
Le morceau, intitulé Let It All In, démarre à pleine balle et nous prend par surprise. La batterie creuse les fondations et la basse navigue là où on ne l’attend pas avec un petite ligne qui reste à jamais au fond de votre crâne. La guitare et les claviers avancent de front. La distorsion se fait sentir, mais pas trop encore. David Heumann commence à chanter et on a l’impression de se retrouver au milieu d’un titre du Crazy Horse où le Loner aurait piqué quelques parties rythmiques à Can. Premier solo, on sent bien l’octaver sur la guitare électrique, puis c’est le second couplet. Solo de nouveau, il est beaucoup plus distordu que le premier. On se retrouve la nuit, à regarder les étoiles en pleine campagne. Certains se perdront dans leurs rêves, d’autres allumeront un joint.
Et puis l’album se conclut avec High Water Song, un vieil air que l’on croirait échappé d’un vieux bar à whisky. Le piano se fait trainant et la six cordes récite ses plus belles lignes pentatoniques. J’écoute ce blues lancinant assis sur mon balcon, et je regarde les quelques fleurs qui poussent aléatoirement. Dans ces moments-là, je traverse mentalement les grands espaces de cette americana perdue.
( ♫) Arbouretum – Let It All In
Mathieu