Je ne surprendrais personne en affirmant que les disques de Dinosaur Jr. constituent ce point de chute, ce phare au milieu de la tempête, cet endroit où, quoiqu’il arrive, quel que soit le degré d’emmerdes que vous subirez dans votre vie, vous vous sentirez toujours tranquille. Pour chaque morceau de Dinosaur Jr. vous aurez trois accords de guitare noyés de fuzz – Jay Mascis possède une immense collection de Big Muff – avec une basse surpuissante – Depuis le décès Lemmy, Lou Barlow tient le flambeau de ceux-qui-jouent-de-la-basse-comme-une-guitare – une batterie tranquille et des solos, plein de solos, encore et toujours des solos. « Sweep It Into Space » ne déroge pas à la règle avec ces treize morceaux, dont deux écrits par Lou Barlow. Et l’approche d’une première vaccination me redonne soudainement l’espoir de revoir un jour ces trois vieux fossiles se démener sur scène pour faire le plus de bruit possible.
Entre le clavier que sort Jay Mascis sur Take It Back et le songwriting à tomber par terre de Lou Barlow sur Garden, j’ai l’impression que le groupe a tenté quelques nouvelles idées sur ces nouvelles compositions tout en continuant tranquillement sur la voie qu’il emprunte depuis 1984. En parcourant rapidement les 12 titres de « Sweep It Into Space », on ressort avec l’impression de porter cette vieille paire de chaussure confortable. Il y a des morceaux heavy, comme To Be Waiting, Hide Another Round ou encore Walking To You, puis on y entend des ballades folk-rock avec I Ran Away et And Me, avant de finir sur du rock indé bien typé 90’s comme To Be Waiting. Du changement dans la continuité dont je sens bien l’influence poppy, certains diront un peu gnan-gnan, de Kurt Vile qui est venu filer un coup de main à la production.
Au risque de me répéter, Garden de Lou Barlow est un chef d’oeuvre qui mériterait une écoute sans fin et un livre à lui tout seul, mais s’il fallait garder un titre de « Sweep It Into Space » je crois que ce serait I Ain’t. Le titre fait l’ouverture du disque dans une constance imperturbable dont l’évidence mélodique saute immédiatement aux oreilles. Quatre accords de guitare fuzz, une basse qui ronfle, un riff 90’s, la voix nasillarde de Jay, un petit solo et Lou sur les choeurs. Je connais ça par cœur, j’ai probablement entendu mieux ou pire de la part du groupe sur d’autres albums, mais le bien fou que nous apporte cette musique est l’une des plus belles choses à écouter en ce moment.
Mathieu