Le monde est probablement en train de brûler, c’est du moins l’impression que j’en ai à l’écoute de « Kannon », le nouvel album de Sunn O))). Des riffs de guitares, contemplatifs, envahissent lentement les derniers espaces libres et font soudainement jeu égal avec les expériences méditatives qu’Athila Csihar module avec sa voix.
Il fait froid ce matin quand je marche dans cette grande rue parisienne. Le soleil brille encore légèrement et vient doucement nous réchauffer. A mesure que j’avance, les guitares me plongent progressivement dans une sorte d’état second. Le titre « Kannon » est une référence à Guanyin Bodhisattva – « la perception des sons (ou des cris) du monde », je ne saurais mieux dire – et en ce qui me concerne cette musique est assurément l’une des plus belles choses que j’ai pu entendre pour se laisser absorber au milieu de je-ne-sais-quel limbe visionnaire tout en restant conscient de la vie qui nous entoure.
Quand les dernières notes distordues finissent lentement de résonner, on peut entendre les synthétiseurs de Steve Moore – qui jouait déjà sur « Monoliths & Dimensions » – ou encore d’Oren Ambarchi. Il y a quelques choses de totalement psychédéliques dans ces modulations, à tel point qu’elles constituent ce moment assez fort où la performance explore soudainement de nouveaux territoires sonores.
Le voyage a commencé. L’écoute se fait en continu, à la rencontre de l’instant présent. L’invitation à l’errance dans cet immense labyrinthe qu’est la conscience de soi est lancée. Les riffs sont une ouverture fascinante vers les ténèbres. Il y a de la noirceur mais aussi beaucoup de mélancolie au milieu de ces cris, de ces déflagrations guitaristiques. Qu’importe, j’ai renoncé depuis longtemps à commenter une musique aussi belle …
( ♫ ) Sunn O))) – Kannon 1
Mathieu